Le rappel du myosotis

Le rappel du myosotis

Mi-juin. Le jardin est toujours introverti; la vie, encore un peu timide. Et soudainement, sans qu’on ne s’y attende, des centaines de milliers de fleurs de myosotis s’épanouissent simultanément, communiquant au jardin une paix rieuse et contagieuse, comme si le ciel s’était enraciné dans la terre : câlin bleuté, murmure pastel, ruisseau étoilé.

On gagne à établir dans sa cour des espèces à floraison printanière qui convieront tôt dans la saison les insectes bénéfiques à s’installer au jardin et à l’adopter comme terrain de chasse. C’est le crocus qui attire les premières butineuses. Puis, suivent en rafale les pulmonaires, les primevères, les rhododendrons, les pavots maritimes et orientaux, le chèvrefeuille, la rhubarbe et la centaurée. Et parmi ces reines du printemps, un matin brumeux de juin, le sol se couvre d’une multitude de fleurs bleu ciel, toutes menues et délicates, toujours fidèles au rendez-vous, année après année, occupant toujours un peu plus d’espace, sans pour autant nuire aux autres cultures. Une adaptation et une intégration parfaites au milieu.

Je suis toujours fasciné par le nombre d’insectes qui s’abreuvent du nectar de cette borraginacée. Et, comme le savent les jardiniers d’expérience, une quantité et une diversité de eurs invitent une multitude d’insectes, dont la majorité est bénéque pour le jardin, assurant la pollinisation d’une multitude d’espèces tout en contribuant au contrôle des espèces potentiellement nuisibles.

Citons le syrphe, un diptère qui ressemble à une guêpe au vol stationnaire et qui se nourrit du pollen et du nectar de nombreuses eurs. Ses larves carnassières se délectent de pucerons, de chenilles, d’acariens, de psylles et d’aleurodes. La guêpe parasitoïde, un hyménoptère long et eflé, s’alimente également de nectar de eurs. Elle pond ses oeufs dans le corps des chenilles, des pucerons ou des thrips. Une fois les oeufs éclos, les larves se nourrissent de leur hôte. On comprendra que plus la biodiversité est importante, plus les populations d’auxiliaires sont élevées et meilleures sont les chances d’atteindre un équilibre écologique. Les contrôles s’effectuent alors naturellement, sans l’intervention du jardinier.

Le myosotis fait partie des végétaux qui sont profitables au jardin. Membre, telle la bourrache, de la famille des borraginacées, le myosotis se cultive comme une bisannuelle. C’est Myosotis alpestris , en anglais forget-me-not , qui est l’espèce la plus commune. On peut l’installer au jardin en juin ou au début de juillet pour une floraison l’année suivante, normalement en juin. Elle se ressèmera par la suite, là où les conditions lui seront favorables. Puis, à tous les printemps suivants, alors que vous l’aurez fort probablement oubliée, elle vous rappellera sa présence en vous communiquant un peu de son insoutenable légèreté.